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L’impact de tels projets sur la vie urbaine est encore marginal. Mais créer une trame d’îlots de fraîcheur pourrait avoir un effet intéressant.
Là où était le bitume, des abeilles butinent. Les parfums de thym et de sauge sclarée ont remplacé les pots d’échappement, les oiseaux pépient et les cigales cymbalisent: caché au pied d’une cité d’Aubervilliers, un jardin sauvage et luxuriant s’épanouit sur l’emplacement d’un ancien parking. Proliférant sur 1400m2 en face de la cité de la Maladrerie, le jardin des Joyeux en Seine-Saint-Denis offre un rare écrin de nature dans une commune populaire et densément urbanisée. Mais aussi un exemple d’initiatives architecturales pionnières, encore sporadiques, destinées à « débitumer » la ville pour l’adapter au réchauffement climatique.
Commandé par l’office HLM d’Aubervilliers et réalisé pour seulement 30.000 euros, ce lieu enchanteur qui fleure bon la garrigue a été créé en une semaine en 2016 à la place d’un parking qui n’avait plus usage. D’un endroit morne et minéral, l’idée était de faire un îlot de fraîcheur urbain. La couche d’enrobé du parking a seulement été fracturée, un peu de substrat répandu dans les fissures. Une végétation alpine, odoriférante et colorée, croît au milieu de morceaux de bitume.
Concepteur du jardin avec l’agence Wagon Landscaping, le paysagiste François Vadepied s’est retrouvé lui-même surpris par l’intensité et la prolifération du vivant dans ce milieu rude. « Ce jardin démontre qu’il est possible en ville de créer des dynamiques végétales extrêmement riches sans arrosage, avec un entretien très extensif, en utilisant le sol de la ville », explique-t-il à l’AFP. Ce projet s’inscrit dans un courant architectural mettant l’accent sur la frugalité. Plutôt que de tout démolir et reconstruire différemment, cette tendance relativement récente privilégie de s’insérer dans le bâti existant et de l’adapter à la nouvelle donne climatique.
Initiatives ponctuelles ou isolées
L’urgence est d’autant plus pressante dans les villes denses et pauvres en verdure. Leur bitume et immeubles créent un effet d’îlot de chaleur urbain qui fait grimper le mercure l’été dans les rues et suer péniblement les citadins. La « débitumisation » des métropoles n’en est cependant encore qu’à un stade embryonnaire et relève surtout à ce jour d’initiatives ponctuelles ou isolées, comme la création dans certaines écoles de « cours-oasis ». « Il y a un mouvement général vers le respect de l’environnement et essayer de retrouver les conditions de la biodiversité », estime la paysagiste Isabelle Boulanger-Rebière, conceptrice d’un jardin sec sur le parking d’une résidence étudiante à Évry, en notant qu’en parallèle « des habitudes perdurent » pour bétonner.
À un kilomètre du jardin des Joyeux, toujours à Aubervilliers, des habitants d’un foyer de jeunes travailleurs discutent sous la fraîcheur d’une canopée d’arbres installée devant leur résidence entre des immeubles. Ici, l’agence Fieldwork Architecture a créé en 2020 une « tierce forêt » sur ce qui était également un parking. Celui-ci n’était plus nécessaire avec l’arrivée du métro dans le centre d’Aubervilliers. « C’est un espace où nous avons essayé de concilier la nature et la ville, l’idée était de ne pas les opposer », raconte à l’AFP Marcos Da Silva, l’un des architectes.
Laisser passer le ruissellement des eaux de pluie
Le sol sombre a été désimperméabilisé et remplacé par un béton drainant clair, composé de granulats qui laissent passer le ruissellement des eaux de pluie. Celles-ci remplissent une réserve d’eau qui, lors des périodes de sécheresse, peut continuer d’alimenter les 70 arbres plantés sur 1500m2. Les essences, surtout des érables champêtres, ont été sélectionnées pour leur transpiration importante qui permet de rafraîchir notablement l’atmosphère. Selon une étude scientifique, le micro-climat du lieu permet en moyenne une baisse de la température ressentie de 3,1°C, qui peut descendre jusqu’à 6,2°C les jours de chaleur accablante.
Dans la mesure où l’armature de la ville reste inchangée, l’impact de tels projets sur la vie urbaine contemporaine reste toutefois encore marginal. Pour Marcos Da Silva, qui travaille actuellement à la végétalisation de cours d’immeubles à Paris, « il faudrait que ces initiatives se généralisent davantage pour créer une trame d’îlots de fraîcheur pour avoir un effet plus important ». Car à part la végétalisation, « il n’y a pas trop de solutions, c’est le levier le plus pertinent pour adapter les villes au changement climatique. On peut mettre des climatisations ou s’enterrer, mais au final ce ne sont pas des solutions durables », juge François Vadepied.
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