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Bruno Le Maire ne veut pas entendre parler de hausse des impôts. Face au dérapage des comptes publics, le ministre de l’Economie ne jure que par une diminution des dépenses – urgente et massive. Pourtant, il est prêt à faire une première entorse à ce dogme de la stabilité fiscale, en prolongeant d’une année supplémentaire la taxe sur les producteurs d’électricité – baptisée « contribution sur les rentes inframarginales » (CRIM).
Interviewé sur BFM vendredi, Bruno Le Maire a redit son opposition à une taxation des « superprofits » des entreprises l’an prochain… sauf pour le secteur énergétique. « Il y aura dans ce budget, comme il y a eu en 2023, une récupération des rentes qui ont pu être faites par les énergéticiens tout simplement parce que les prix ont flambé », a expliqué le ministre.
Dissensions dans la majorité
Bruno Le Maire fait cette concession alors que les débats, au sein même de la majorité, sont de plus en plus vifs sur les questions fiscales. Le Modem se fait depuis longtemps l’avocat de hausses ciblées (taxe sur les rachats d’actions et les superdividendes, ISF vert…). Récemment, de nombreuses voix – à commencer par celle de la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet – entonnent une mélodie similaire et appellent le gouvernement à ne pas s’arc-bouter sur ses positions. Plusieurs parlementaires Renaissance songent à porter eux-mêmes une proposition de loi sur la taxation des « superprofits ».
Pour court-circuiter ces débats, Bercy ouvre donc la porte à une nouvelle taxation exceptionnelle des seuls producteurs d’électricité en 2025. Et même à son durcissement. « Je suis tout à fait prêt à ce que l’on regarde cette contribution inframarginale pour l’améliorer et s’assurer que les énergéticiens ne font pas des rentes sur l’énergie », a expliqué Bruno Le Maire ce lundi sur RTL.
Une taxe mal ficelée
Cette remarque fait écho aux vives critiques exprimées par la Cour des comptes la semaine dernière à propos de la CRIM. Les magistrats financiers dénonçaient les trous dans la raquette du dispositif, qui ont permis aux producteurs, distributeurs et intermédiaires des marchés de gros de l’électricité d’empocher 30 milliards d’euros de marges bénéficiaires à la faveur de la crise énergétique – quand l’Etat n’en a recouvré que 2,8 milliards d’euros grâce à la CRIM en 2022 et 2023 (selon les dernières estimations publiées en décembre par le gouvernement)… à des années-lumière des 12,3 milliards escomptés.
Dans son rapport, la Cour des comptes invitait le Parlement à « faire évoluer le champ et les modalités de calcul de la contribution sur les rentes inframarginales au titre de 2024, afin d’en augmenter le rendement ». Bercy semble favorable à un durcissement. Reste à savoir par quel biais. S’agira-t-il de l’étendre à certaines filières exclues comme les réservoirs hydrauliques ? D’abaisser les seuils caractérisant les marges taxables des différentes technologies ? De relever la part de ces marges excédentaires ponctionnée par le fisc – initialement fixée à 90 % mais ramenée en 2024 à 50 % ?
Incertitude juridique
Quel qu’en soit le levier, la mesure risque fort d’être mal accueillie par les producteurs d’électricité. Plusieurs d’entre eux ont déjà, selon nos informations, déposé un recours devant le Conseil d’Etat l’été dernier, dénonçant l’illégalité d’un dispositif qui dépasserait largement le cadre du règlement européen dans lequel il était censé s’inscrire. Celui-ci ne permettait en théorie aux Etats membres de plafonner les marges des énergéticiens que du 1er décembre 2022 au 31 décembre 2023.
« La Commission européenne a conclu en juin 2023 qu’il était préférable de ne pas prolonger le plafonnement, car le dispositif engendrait trop de divergences d’un pays à l’autre et pouvait provoquer un dérèglement du marché », explique Sarah Dardour-Attali, avocate associée au cabinet CMS Francis Lefebvre, qui rappelle qu’un recours a été déposé au niveau européen par des producteurs belges. « Une question préjudicielle a été renvoyée par la Cour d’appel de Bruxelles à la Cour de justice de l’Union européenne. Sa décision pourrait avoir une incidence sur l’application passée et future de mesures de plafonnement en France ».
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