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C’est une double peine pour les personnes à la rue. En plus d’avoir à affronter les difficultés en vivant dehors et de souffrir de l’isolement, elles reçoivent des condamnations plus lourdes et leurs droits sont très souvent bafoués. Le colloque organisé le 13 juillet dernier par le Barreau de Paris Solidarité et le Barreau des rues, qui apportent une aide juridique à un public éloigné du droit, a fait la lumière sur cette répression policière et judiciaire.
À la 23e chambre correctionnelle où se déroulent les comparutions immédiates (procédure rapide où la personne est jugée immédiatement après sa garde à vue), la sévérité des peines infligées aux gens à la rue ou sans-papiers s’illustre ainsi de manière flagrante. « Les SDF et les étrangers y sont surreprésentés, explique Anne-Sophie Laguens, avocate et cofondatrice du Barreau des rues. 70 % des peines qui y sont prononcées sont de la prison ferme. »
La police pointée du doigt
L’enjeu, de taille, consiste à faire comprendre à ces personnes qu’elles sont, elles aussi, sujets de droit. Car il est fréquent que des actes illégaux dont elles sont victimes restent impunis. « Les flics débarquent avec un camion-benne et disent : »Vous prenez vos affaires et vous dégagez.« Ils n’ont pas d’autorisation mais les gens ne s’y opposent pas car ils ont peur d’aller en garde à vue » , donne en exemple Pierre Mouton, de Robin des rues, association qui organise des maraudes, notamment au Nord de Paris. « Les forces de l’ordre n’en ont rien à faire aujourd’hui que ce soit illégal, poursuit-il. Les personnes à la rue ne porteront pas plainte car elles subiraient une humiliation ou un mauvais traitement, et perdraient une journée de manche. »
Les exemples de répression policière, malheureusement, ne manquent pas. Le 20 juin dernier, des jeunes migrants ont manifesté sur la place du Palais-Royal pour demander une prise en charge de l’État faute d’avoir été reconnus mineurs par l’aide sociale à l’enfance. « Ils ont été arrêtés et certains placés en garde à vue », témoigne Pierre Alauzy, coordinateur de la veille sanitaire, de Médecins du Monde. Il dresse de son expérience sur le terrain un constat accablant : « Le simple fait d’être un migrant fait de la personne quelqu’un à rejeter, voire à criminaliser. »
Des formes de répression plurielles
Les parcours de vie des personnes à la rue sont très divers, mais toutes subissent des formes de répression. Pierre Mouton note une « intolérance grandissante à l’égard de tous les profils, qu’ils soient migrants, toxico, vagabonds… », ou qu’il s’agisse de personnes en détresse psychique ou isolées, de professionnels du sexe, de travailleurs qui n’ont pas de logement… La liste n’est pas exhaustive.
[vidéo:https://www.dailymotion.com/video/x8lrjm2]
Ces répressions, loin d’être des cas isolés, ont une dimension systémique. C’est ce que montre le travail de la sociologue et urbaniste Camille Gardesse. En matière de politique pénalisant les personnes à la rue, elle a identifié deux types d’action. D’une part, l’évacuation de campements par la police, suivie d’un harcèlement policier. D’autre part, le déploiement d’un urbanisme dissuasif sécuritaire, qui prend par exemple la forme de sièges à la place de bancs, d’assises inclinées, de pics ou de grillages. Comme le résume Paul Allauzy, « au lieu de répondre par le social et par la santé, on répond par l’ordre ».
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