[ad_1]
On ne bluffe pas. Tout en déclarant que la négociation avec la junte militaire restait le « socle de notre approche », selon les mots du président du Nigeria, Bola Tinubu , à l’ouverture d’un nouveau sommet exceptionnel de la Cedeao (communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest), cette dernière a annoncé, jeudi soir, « activer sa force d’intervention » contre le Niger.
Cette mobilisation des forces armées des pays concernés, qui n’ont pas été précisés dans le communiqué, n’implique pas pour autant une opération militaire immédiate contre les putschistes ayant renversé, le 26 juillet, le président Mohammad Bazoum démocratiquement élu.
Ultime coup de semonce
Cela ressemble plutôt à un ultime coup de semonce avant de passer à l’action si le dialogue, que la Cedeao dit toujours privilégier, avec la junte n’aboutit pas. Discuter après avoir posé ostensiblement un calibre sur la table, en quelque sorte. Alors que la plupart des observateurs croyaient ces derniers jours que la menace formulée par ce bloc de quinze Etats pesant pour un tiers de la population africaine était du bluff.
Il est vrai que l’ultimatum lancé par la Cedeao le 30 juillet, qui donnait huit jours à la junte pour rétablir l’ordre constitutionnel, au risque sinon d’une intervention militaire , avait expiré dimanche soir sans conséquences. Ce qui n’impliquait toutefois pas pour autant qu’il était lettre morte.
Les risques élevés d’une intervention
Une intervention militaire de la Cedeao, plausible à cette heure donc sans être pour autant décidée, comporte des risques très importants. Il faudrait en effet que les armées nigérianes, ivoirienne et sénégalaise se coordonnent, alors qu’elles n’ont jamais travaillé ensemble, pour s’emparer de Niamey, largement favorable aux putschistes pour des raisons ethniques : la capitale du Niger est en majorité peuplée d’Haoussas (40 % des 21 millions de Nigériens), dont sont issus presque tous les généraux putschistes, alors que Mohammad Bazoum est d’origine arabe et s’appuie sur les Touaregs.
Cet aspect ethnique compliquerait aussi toute intervention militaire, car les Haoussas sont proches des populations du nord du Nigeria, qui constitueraient l’essentiel d’une force d’intervention. Dernière difficulté, le président Bazoum est otage des putschistes qui ont laissé entendre qu’ils l’exécuteraient en cas d’assaut visant à le délivrer.
Enfin, la base juridique d’une intervention est très fragile. Le chapitre VII de la charte de l’ONU ne les autorise qu’en cas d’atteinte à la sécurité et la stabilité régionale et la Cedeao, de plus, est une organisation surtout économique, sans volet militaire prononcé. Elle a toutefois déjà mené une intervention contre un président gambien piétinant la Constitution en 2017, mais avec la complicité de l’armée locale…
Couper l’électricité ne suffira sans doute pas
Toutefois, l’alternative -miser sur des sanctions économiques suffisantes pour faire céder la junte- est très incertaine aussi. Des sanctions, même massives, parviennent rarement à leur objectif politique, du moins pas en quelques mois. En outre, le Niger pourrait continuer à commercer, ou faire de la contrebande via ses deux alliés putschistes, le Mali et le Burkina Faso, ou l’Algérie, qui n’a dénoncé le coup d’Etat que du bout des lèvres et mène une diplomatie ouvertement hostile aux Occidentaux alliés de la Cedeao.
Les perspectives de négociations s’avèrent par ailleurs minces, puisque la junte a interdit l’accès, mardi, à une délégation conjointe de la Cedeao, de l’Union africaine (UA) et des Nations unies. Autre signe de défiance de la junte, elle a formé, jeudi matin, un gouvernement de vingt membres après avoir désigné, la veille, un Premier ministre, Ali Mahaman Lamine Zeine. Ceux de la Défense et de l’Intérieur sont des généraux putschistes.
La Cedeao joue sa survie, comme les régimes civils locaux
Il en va pour la Cedeao de sa crédibilité, voire de son existence, tout comme ses Etats membres jouent leur statut de régime civil après le putsch du Niger, car ce dernier menace de faire tache d’huile. Il s’agit du cinquième dans la région en trois ans… Laisser pourrir la situation, avec une junte dont on se satisferait moyennant de vagues promesses de transition vers un régime civil un jour ne semble pas une option acceptable pour la Cedeao, présidée en outre par le Nigeria, principal pays africain sur le plan démographique et économique et doté de la troisième armée du continent et dont le président a clairement dit qu’il était vital de stopper cette spirale de putsch. Les armes risquent vraiment de parler.
[ad_2]
Source link