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Publié le 3 nov. 2023 à 11:38Mis à jour le 3 nov. 2023 à 14:05
Au Venezuela, le compromis trouvé entre le pouvoir et l’opposition après deux ans de tractations, avec levée des sanctions américaines à la clé, est en danger. La Cour suprême vénézuélienne se refuse de valider les résultats de la primaire de la plate-forme d’opposition, remportée haut la main (92 %) le 22 octobre par Maria Corina Machado. Il est étonnant de voir la Cour mettre en cause une consultation organisée par un parti politique sans le concours de la commission électorale, mais la justice est notoirement aux ordres de l’exécutif dirigé par Nicolas Maduro.
Un doute sur la sincérité du régime
Pour faire bonne mesure, la Cour suprême a lancé une enquête pour fraude et réaffirmé l’inéligibilité pour quinze ans de Maria Corina Machado pour une affaire de corruption qu’elle juge politiquement motivée. La justice vénézuélienne exige en outre tous les documents de la primaire, y compris les registres de vote, que l’opposition ne veut pas dévoiler afin de protéger l’identité des votants et éviter des représailles du pouvoir à leur encontre.
Cette suspension d’une primaire qui a mobilisé 4,2 millions d’électeurs, un chiffre spectaculaire pour un pays de 28 millions d’habitants, fait douter de la sincérité du pouvoir et menace l’accord entre le régime et l’opposition signé sous médiation de la Barbade, le 17 octobre. Cet accord prévoit une élection présidentielle au second semestre 2024 en présence d’observateurs internationaux. La dernière présidentielle, en 2018, avait été marquée par des arrestations et fraudes massives avant le scrutin qui avaient poussé l’opposition à le boycotter.
Réserves de pétrole
Surtout, cet accord a conduit les Etats-Unis à alléger pour six mois l’embargo pétrolier imposé au Venezuela, assis sur les principales réserves mondiales de pétrole en tenant compte de l’or noir dit « non conventionnel », difficile à extraire et à raffiner.
Washington a averti Caracas que le non-respect de l’accord l’exposerait au rétablissement des sanctions. Le régime affiche un anti-américanisme virulent depuis l’élection à la présidence d’Hugo Chavez, auquel a succédé à son décès en 2013 Nicolas Maduro. Ce qui n’empêchait pas le Venezuela de vendre la majorité de son pétrole aux Etats-Unis.
La levée des sanctions sur les exportations d’un pétrole rapportant la quasi-totalité des recettes en devises du Venezuela est d’autant plus indispensable que le pays s’est terriblement appauvri depuis une quinzaine d’années. Le « socialisme du XXIe siècle » lancé par Chavez puis Maduro s’est en effet traduit par de la corruption, des pénuries, de l’inflation et une pauvreté extrême.
Des indicateurs économiques et sociaux vertigineux
Les services publics sont affligeants, avec des hôpitaux où les patients sont priés d’apporter leurs draps et des coupures fréquentes d’électricité, un comble au vu des ressources énergétiques du pays. Il est vrai que, faute d’entretien en raison de la fuite des investisseurs occidentaux échaudés par les expropriations, la production de pétrole est en chute libre : elle ne dépasse plus 650.000 barils par jour, la moitié du niveau d’il y a douze ans. Le Venezuela n’est plus que le 22e producteur mondial d’or noir alors qu’il était un des trois membres fondateurs du cartel de l’Opep en 1960 !
Des millions de Vénézuéliens ont fui le pays et les files d’attente devant les magasins, quand ils sont approvisionnés, sont spectaculaires. Le PIB par habitant, le plus élevé d’Amérique latine jusque dans les années 1980, a chuté de 80 % depuis 2013 pour figurer désormais parmi les plus bas. La mortalité infantile flambe et les adultes Vénézuéliens ont perdu en moyenne 8 kg au cours des cinq dernières années. La pauvreté frappe les deux tiers des habitants, alimentant une criminalité telle que le pouvoir a… interdit la publication de statistiques sur les meurtres pour « atteinte au moral de la nation ».
Comment va réagir Washington ?
L’opposition ne s’est, mercredi, pas laissé intimider par le coup de force de la Cour suprême. « Rien ni personne ne peut ignorer les résultats et leurs effets politiques. Tous ceux qui ont participé à la primaire ont choisi une candidature unie qui a un mandat clair du peuple vénézuélien », a déclaré Biagio Pilieri, porte-parole de la Plateforme unitaire démocratique (PUD). Cette dernière a rassemblé, après des années de désunion, des partis aux orientations très diverses, du centre gauche à l’extrême droite, même si Machado tient un discours relativement libéral au centre droit.
Reste à savoir si Washington oserait rétablir les sanctions, ce qui serait de nature à nourrir une hausse des cours mondiaux du pétrole, déjà sous pression en raison des tensions géopolitiques planétaires.
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