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Publié le 18 janv. 2024 à 18:48Mis à jour le 18 janv. 2024 à 18:58
C’est un échange de tirs de missiles qui a, sur le papier, de quoi donner des sueurs froides. Le Pakistan, deuxième pays musulman de la planète et puissance nucléaire, a répliqué, jeudi, par un tir sur le territoire de l’Iran, puissance perse et chiite qui se conçoit comme le caïd du golfe Persique, à un raid de même type, mardi soir sur son propre territoire.
Un échange de tirs de missiles absolument sans précédent qui a de quoi surprendre, puisque les deux voisins ne nourrissent pas de contentieux bilatéral. Ils ont même signé en août dernier un mémorandum pour porter leur commerce bilatéral à 5 milliards de dollars en cinq ans et Islamabad construit un gazoduc pour importer du gaz iranien, quoique le chantier accumule les retards.
Comment envoyer des missiles sur un pays ami
Mais voilà, les deux pays sont confrontés depuis des décennies à des insurrections larvées le long de leur frontière commune de 1.000 km dans la région du Balouchistan. Cette dernière est la province la plus grande, la moins peuplée et la plus pauvre du Pakistan, siège d’une rébellion séparatiste. La région est riche en hydrocarbures et en minerais, mais sa population se plaint d’être marginalisée et spoliée de ses ressources naturelles.
Elle abrite aussi les bases arrière d’un mouvement djihadiste, Jaish al-Adl, ennemi du régime chiite des mollahs et qui avait tué en décembre onze policiers lors d’une incursion en Iran à travers la frontière très poreuse. Ce qu’a invoqué Téhéran mercredi pour justifier son bombardement d’une base supposée du mouvement au Pakistan, tuant une demi-douzaine de civils, selon Islamabad. Le Pakistan, qui avait besoin de répliquer pour sauver la face, a lui aussi prétendu viser une base terroriste en Iran, jeudi matin. Son raid a tué une dizaine de personnes.
L’Iran a exigé des « explications immédiates » au Pakistan, lequel avait la veille protesté vigoureusement contre « une atteinte grave à sa souveraineté » et rappelé son ambassadeur à Téhéran. Les deux Etats ont toutefois pris soin de souligner dans leurs communiqués respectifs, rédigés de manière très comparable, qu’ils considéraient leur voisin comme un pays « ami et fraternel » et ne le visaient pas vraiment, leur objectif limité étant seulement de détruire des bases terroristes clandestines. Même si les déclarations courroucées risquent de continuer quelques jours, un nouveau round de tir de missiles semble donc peu probable.
« Une escalade militaire très surprenante »
« Une escalade militaire serait très surprenante, estime Farzana Shaikh, spécialiste de la région au think tank Chatham House, puisque les deux pays n’ont clairement pas intérêt à une guerre régionale. » Le Pakistan est dans une situation économique et politique très délicate et organise des élections le 8 février. L’économie iranienne, soumise à des sanctions massives des Etats-Unis depuis six ans et où très peu de firmes osent opérer de peur de perdre le vaste marché américain, n’est pas au mieux non plus.
Ali Vaez, expert de la région au cabinet Crisis Group estime aussi qu’une escalade « serait bien trop dangereuse pour les deux parties. On assiste, certes, à une crise dans leurs relations, mais pas une rupture, aucun n’a intérêt à ce que ça dégénère. De plus, la Chine, considérée comme un honnête broker par les deux parties, est intervenue immédiatement pour appeler au calme ».
Aucune des autres grandes puissances n’a, non plus, intérêt à un conflit régional sur fond de Proche-Orient devenu incandescent en raison de la guerre entre le Hamas et Israël et des attaques des rebelles houthis du Yémen, soutenus par l’Iran, contre des navires de commerce en mer Rouge.
Téhéran a besoin de répondre à Washington
Précisément, les Etats-Unis ont commencé récemment à frapper des bases houthies au Yémen même. Ce qui, en sus d’un attentat sur son sol et de l’élimination par Israël de cadres de ses alliés du Hamas ou du Hezbollah, a été vécu comme une série de revers à Téhéran où la pression montait sur la nécessité d’effectuer une démonstration de force.
L’Iran, qui a frappé mardi au Kurdistan irakien et en Syrie des sites « d’espions et terroristes sionistes », « avait besoin de montrer ses muscles et qu’il est une puissance à prendre au sérieux, mais sans aller plus loin », explique Farzana Shaikh. Le problème étant, souligne Ali Vaez, que Téhéran a « envoyé un message martial à la mauvaise adresse, puisque si l’Irak et la Syrie ne sont pas en position militairement de répliquer, le Pakistan ne boxe pas dans la même catégorie ».
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