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La crise du logement couve depuis que le Portugal, menacé de banqueroute, a fait appel en 2011 à une aide financière internationale. L’arrivée des investisseurs étrangers a « déséquilibré le marché » en creusant l’écart « entre les salaires et les prix des logements ».
« On a peur d’être mis à la rue à tout moment! », s’inquiète Alcina Lourenço, une habitante de Lisbonne touchée par la crise du logement que le gouvernement portugais peine à enrayer malgré la série de mesures annoncées récemment. Du jour au lendemain, cette Lisboète de 49 ans a vu son loyer multiplié par 20, passant de 30 à 600 euros. Incapable d’y faire face, elle a été priée de quitter son appartement situé dans un quartier du centre de Lisbonne, où elle vit depuis l’âge de six ans. « Je ne sais pas où aller! », soupire cette femme qui s’occupe de son père de 89 ans en fauteuil roulant et de son mari de 61 ans, atteint d’un cancer.
La crise du logement couve depuis que le Portugal, menacé de banqueroute, a fait appel en 2011 à une aide financière internationale. Pour renflouer ses caisses et satisfaire aux exigences de ses créanciers, le pays s’est alors ouvert aux capitaux étrangers grâce à une série de mesures telles que les « visas dorés » — des permis de séjour accordés à des riches investisseurs — ou des avantages fiscaux pour les retraités étrangers et les « nomades numériques ».
Prolifération des logements touristiques
Ces investisseurs ont largement contribué à la dynamisation du marché immobilier et à la rénovation des grandes villes, qui ont vu proliférer les logements touristiques de courte durée en réponse à l’afflux de vacanciers. Entre 2012 et 2021, le coût du logement a progressé de 78% au Portugal, contre 35% dans l’ensemble de l’Union européenne, selon une étude de la Fondation portugaise Francisco Manuel dos Santos. Au deuxième trimestre 2023, le loyer médian a encore bondi de 11% en glissement annuel, d’après des données officielles publiées cette semaine.
L’arrivée des investisseurs étrangers a « déséquilibré le marché » en creusant l’écart « entre les salaires et les prix des logements », alors que près d’un quart des actifs portugais vit avec un salaire minimum mensuel de 886 euros, commente à l’AFP Agustin Cocola-Gant, chercheur à l’Institut de géographie et d’aménagement du territoire de l’Université de Lisbonne. La hausse des taux d’intérêt décidée par la Banque centrale européenne (BCE) en réponse à la crise inflationniste a rendu la situation encore plus dramatique dans un pays où 87% des détenteurs de prêts immobiliers sont soumis à des taux variables.
La fin des « visas dorés »
« Ma mensualité est passée de 400 à 647 euros », raconte Claudia Martins, une professeur de 40 ans, qui habite seule dans la banlieue nord de la capitale portugaise.
Elle avait choisi d’emprunter pour s’acheter un appartement en 2021, car cela lui avait permis de réduire considérablement son budget logement. « Aujourd’hui, je survis! », se lamente désormais cette femme, qui a dû se résoudre à chercher un deuxième emploi.
Pour venir en aide à près d’un million de familles, le gouvernement a décidé de permettre aux emprunteurs de bénéficier d’un taux réduit pendant deux ans. Ce dispositif s’ajoute au train de mesures présenté en mars visant à freiner la flambée des prix, qui prévoit notamment la fin des « visas dorés » ou la location obligatoire d’appartements vacants depuis plus de deux ans dans les régions les plus peuplées. Mais ce programme est loin de faire l’unanimité. Après le veto opposé en août par le président, la majorité socialiste au Parlement l’a revoté fin septembre malgré les critiques de l’opposition, de gauche comme de droite. « Le gouvernement n’a pas le courage nécessaire pour réguler le marché » et insiste sur « des mesures qui n’auront aucun effet », regrette Rita Silva, une militante de l’association pour le droit au logement Habita, une des organisatrices de manifestations.
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