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Face à un peso local rongé par l’inflation, les loyers sont toujours plus inaccessibles.
Quelques étrangers sous le charme, des milliers de Porteños en alarme: deux tribus aux fortunes immobilières contraires cohabitent à Buenos Aires en pleine crise du logement, avec des loyers toujours plus inaccessibles avec un peso local rongé par l’inflation, mais qui aimantent le dollar des expatriés. « Le plus dur, c’est la sensation de redevenir un enfant, sans autonomie… » Martina Campos, 33 ans, fait visiter à l’AFP son « chez elle » depuis un an: la maison de sa mère où elle a emménagé avec mari et enfant de 2 ans, après avoir quitté leur appartement, dont le loyer allait augmenter. Pourtant, c’était le juste moment d’en trouver un autre… qu’ils ne purent jamais s’offrir.
Dans une pièce-chambre surchargée, les objets du couple s’amoncellent: table, cafetière, micro-ondes, dans un recoin leur frigo vide, des cartons dans une salle de bain. Et des perspectives sombres, à mesure que les salaires sont distancés par l’inflation (108% sur un an). Même pour un couple de la classe moyenne comme Martina (anthropologue) et Bruno (technicien informatique). « Il y a quelques mois », ils visaient un plafond de 150.000 pesos (625 dollars au taux officiel) de loyer mensuel, auquel serait consacré 50% du budget du ménage. « Aujourd’hui même en y consacrant 70%, on n’arrive pas à trouver un logement », se désespère-t-elle.
« On n’a rien à louer en pesos »
Avec un peso en chute continue (488 pour un dollar au taux informel, contre 206 il y a un an), et aucune certitude sur sa valeur après-demain, plus un propriétaire ne veut entendre parler de loyer en pesos. Compliqué dans un pays soumis au contrôle des changes (accès limité à 200 dollars par mois).
« On n’a rien à louer en pesos, et quand on rentre un bien, il part en quelques heures, les gens sont désespérés, ils ne demandent même pas à le voir, veulent réserver sur de simples photos », décrit à l’AFP Fernanda Ledesma, agente immobilière chevronnée.
La situation est aggravée par une loi locative initialement censée protéger les locataires, qui depuis mi-2020 (quand l’inflation n’était « que » de 36%) encadre les loyers à une seule hausse par an. « Une bombe à retardement, car les baux arrivés à échéance mi-2023 feront un bond de 100% », prédit Alejandro Bennazar, de la Chambre immobilière argentine. Aussi, nombre de propriétaires préfèrent garder un logement vide plutôt que de louer à un loyer gelé pour un an, et attendent un changement de législation. Ce qui tarit encore plus l’offre. Ou alors ils louent hors de tout cadre légal, à un ami, un parent, une connaissance. Avec des conditions à leur bon plaisir.
« C’est la pire crise du logement depuis 30 ans » à Buenos Aires, diagnostique le président de l’Institut du logement (sorte d’office HLM) de la municipalité, Gabriel Mraida, qui estime à 130.000 le nombre de logements vides dans la capitale.
Officiellement « il y a quelque 70.000 logements locatifs dûment enregistrés dans la cité, mais on sait tous qu’environ 500.000 ménages sont locataires, c’est vous donner une idée de l’informalité… », ajoute-t-il.
« Les locaux n’ont plus les moyens de vivre dans leur propre ville »
Le dollar, lui, trouve sans mal un logis. Avec ascenseur, confort moderne et éventuellement vue panoramique, comme Jamie Larson, Néo-Zélandais de 29 ans, un des « nomades digitaux » arrivés en nombre ces dernières années (post-Covid, et profitant du taux change). Et qui télétravaille pour une société informatique californienne. « Si je faisais à Londres ce que je fais ici, pour le même loyer je vivrais dans une boîte à chaussure » sourit-il, dans son appartement de 65m2 dans le quartier branché de Palermo. Non sans une touche de culpabilité quand même, pour sa contribution à une distorsion du marché local.
« C’est complètement dingue, quand tu vois les salaires que touchent les gens d’ici actuellement, d’attendre qu’ils paient en dollars (…) On en arrive à une situation où les locaux n’ont plus les moyens de vivre dans leur propre ville. C’est absurde », dit-il d’un phénomène qui s’étend, par ricochet, à des quartiers pas forcément touristiques.
Reste que « ce sont les propriétaires qui décident ce qu’ils font de leur bien »: vente (il y en a beaucoup), location courte durée, voire AirBnB, ou location normale, résume Sebastian Resguardo, courtier immobilier. Et en dollars, s’il vous plaît. Baux longue durée en pesos s’abstenir. La municipalité, impuissante, initie bien des aides, des crédits avantageux pour les coûts de déménagement, ou pour rénover des appartements à condition de mise en location. Mais « il n’y pas de solution magique, ce qu’il faut c’est stabiliser l’économie », analyse Gabriel Mraida. Avec ou sans toit, les Argentins ne le savent que trop.
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